Intervention au parlement bruxellois concernant "la situation de l'aéroport de Bruxelles-National depuis l'entrée en vigueur du moratoire sur le survol de Bruxelles en date du 2 avril 2015 ".

La parole est à M. Serge de Patoul (FDF) député

Même si le dossier est vaste, je voudrais axer mon intervention sur un point qui doit absolument être éclairci à ce stade. L'arrêt de la Cour d'appel de Bruxelles du 9 juin 2005 rendait les routes aériennes de l'époque illégales et fixait des astreintes. Or, le plan Galant de survol de Bruxelles reprend ces routes aériennes. Les FDF ont toujours défendu l'idée que les Bruxellois aient une démarche collective et unique, quel que soit leur lieu d'habitation. Le problème du survol de Bruxelles les concerne tous, vu la proximité de l'aéroport de Bruxelles-National (Brussels Airport) et les facilités de changement des routes aériennes. Cette approche collective des Bruxellois est la meilleure manière de défendre leurs intérêts dans le dossier du survol de Bruxelles. Il est patent que les décollages et atterrissages des avions à Brussels Airport, en application du plan Wathelet et des routes antérieures à celui-ci aujourd'hui plan Galant provoquent en Région bruxelloise des nuisances sonores constitutives d'infractions ou de menaces graves d'infraction à l'article2 de l'arrêt du gouvernement bruxellois du 27mai1999 relatif à la lutte contre le bruit généré par le trafic aérien, et à l'article20 de l'ordonnance du 17juillet 1997 relative à la lutte contre le bruit en milieu urbain. 

Pour rappel, à la suite de l'arrêt de la Cour d'appel de Bruxelles du 9 juin 2005, la Région bruxelloise a, depuis le 15 octobre 2005, le pouvoir d'exiger des astreintes à l'encontre du gouvernement fédéral pour chaque infraction constatée à son arrêté bruit, dit arrêté Gosuin. Elle dispose ainsi d'un moyen de pression non négligeable dans le cadre des discussions liées au survol de Bruxelles avec l'État fédéral, qui n'a cependant pas été utilisé par les gouvernements bruxellois précédents. 

Par ailleurs, à ce jour, il n'y a pas eu de nouvelle signification du jugement à la suite de l'arrêt de la Cour d'appel de Bruxelles du 9 juin 2005. Dans un premier temps, l'arrêté Gosuin a été contesté. Après des avis contradictoires des auditeurs des chambres flamande et francophone, l'assemblée générale bilingue du Conseil d'État, qui réunit des juges des deux rôles linguistiques, a rendu, le 10mai 2006, trois arrêts validant les normes de bruit à respecter dans le ciel bruxellois. En clair, elle juge l'arrêté pris par l'ancien ministre de l'Environnement, Didier Gosuin, légal et constitutionnel.

Le 30 mars 2011, la Cour constitutionnelle rend son arrêt n°44/2011 en réponse à une série de questions préjudicielles posées par le Conseil d'État à propos de l'ordonnance du 25 mars 1999 relative à la recherche, la constatation, la poursuite et la répression des infractions en matière  d'environnement. Dans cet arrêt, la Cour valide le régime des amendes administratives prévu par cette ordonnance, mais constate toutefois une violation de la Constitution à l'article 33. Celui-ci ne prévoit en effet pas la possibilité de tenir compte de circonstances atténuantes. Le 24 novembre 2011, le parlement bruxellois a corrigé ce motif d'inconstitutionnalité en adoptant une correction. A la suite de recours, le 16 janvier 2014, la Cour constitutionnelle dit pour droit : « Les termes 'amendes définitivement prononcées jusqu'au 3 juin 2011 » dans le dispositif de l'arrêt 134/2012 du 30 octobre 2012 visent les amendes prononcées qui ne sont plus susceptibles, le 3juin 2011, de faire encore l'objet d'un recours en annulation devant le Conseil d'État, ainsi que les amendes prononcées qui ont fait l'objet d'un recours en annulation qui a été rejeté par le Conseil d'État au plus tard le 3 juin 2011". Les mêmes termes ne visent pas les amendes  prononcées jusqu'au 3 juin 2011, qui font l'objet d'un recours en annulation sur lequel le Conseil d'État doit encore se prononcer après le 3 juin 2011. Tous les procédures étant closes - et ce dossier a vu intervenir toutes les procédures juridiques possibles-, le gouvernement bruxellois précédent n'a pas pour autant signifié l'arrêt de la Cour d'appel de Bruxelles du 9juin 2005. En réponse à des interpellations de Mme Persoons, de feu M.Simonet et de moi-même, développées lors de la réunion de la Commission de l'environnement du 13 octobre 2005, Mme Huytebroeck, à l'époque ministre de l'Environnement, expliquait, sur la question des astreintes, qu'elles étaient de sa compétence et qu'elle n'avait pas besoin d'un accord du gouvernement en la matière. La signification du jugement suit le même raisonnement. La mise en application d'un jugement n'est valable que pendant une durée de dix ans s'il n'y pas signification, par la partie demanderesse, de son application. Aujourd'hui, c'est la Région bruxelloise, ou Bruxelles- Environnement, qui doit procéder à cette notification. Si ce n'est pas fait dans les prochaines semaines, et même dans les prochains jours, ce jugement n'existera plus. La procédure judiciaire devra repartir de zéro. 

Il y a donc urgence!  Sur la base des propos de votre prédécesseur, Mme Huytebroeck, vous avez la pleine compétence pour procéder à cette notification. Pouvez-vous nous fournir des précisions sur l'état exact d'avancement de cette nouvelle signification de l'arrêt de la Courd'appel de Bruxelles du 9 juin 2005 ? Pouvez-vous nous donner un calendrier de la mise en œuvre de cet arrêt? Il n'y a qu'une réponse à donner à la première question. En effet, ne pas procéder à cette signification serait une faute politique grave. Il serait catastrophique pour les Bruxellois - et politiquement inacceptable - que ce jugement ne soit pas signifié.

Enfin, il me semble essentiel que les Bruxellois aient un discours unique qui tende vers un réel contrôle exercé par l'entreprise publique autonome Belgocontrol. Cette dernière est en train de faire tout et n'importe quoi, et ne semble absolument pas contrôlée par la ministre fédérale, Mme Galant. Pour le dire autrement, Belgocontrol ne semble pas connaître la ministre de la Mobilité. Ils évoluent dans deux mondes différents et on a l'impression d'être confronté à un organisme sans ministre, ou une totale absence de relation entre la ministre et Belgocontrol. 

Pour les Bruxellois, il est par ailleurs indispensable de délocaliser partiellement cet aéroport. Il faut qu'ils le proclament haut et fort, car cette possibilité est au bout de leurs doigts. Nous disposons d'une infrastructure qui le permet et d'un triangle d'aéroports -Bruxelles National, Charleroi Bruxelles-Sud, Liège - offrant un service répondant aux besoins, tout en préservant l'environnement au bénéfice de tous. Par ailleurs, je tiens à rappeler l'absolue nécessité d'une vraie nuit de fermeture de l'aéroport, allant de 22 heures à 7 heures du matin. Si vous regardez le panneau des départs et des arrivées à Brussels Airport aujourd'hui, vous constaterez que, de manière habituelle, des avions décollent à 23h30 et atterrissent avant 6 heures du matin. Ce n'est pas ainsi qu'il faut concevoir une vraie fermeture de nuit! De même, les Bruxellois doivent clairement signifier qu'il importe de limiter le nombre de mouvements à Brussels Airport et qu'il est donc tout à fait déraisonnable de vouloir y attirer de nouvelles compagnies. 

Cela aura pour effet d'augmenter le nombre de mouvements. Enfin, il est absolument essentiel de rappeler que ce sont les zones les moins densément habitées qui doivent être survolées, comme c'est l'usage aux abords de tous les autres aéroports.